Voici un sommaire d’un jugement portant sur le droit de la Banque de se faire rembourser les honoraires juridiques qu’elle a encourus pour poursuivre la Caution en justice et obtenir un jugement contre elle.

Faits

Les faits de cette affaire se résument comme suit :

1. La Banque a une réclamation de 35 000 $ contre son emprunteur, lequel a fait faillite;

2. La Banque poursuit la Caution pour 35 000 $, plus pour une somme de 31 000 $ représentant les frais juridiques encourus par la Banque pour poursuivre l’emprunteu

3. Le cautionnement contenait la clause suivante :

“The guarantor’s liability includes the liability to pay any interest the customer has not paid, and interest from the date of demand. This interest is charged at the applicable rate in the agreement. The guarantor must also pay all of the costs and expenses we incur to get the money the customer owes us, including any costs and expenses of collecting from the guarantor including without limitation legal fees on a solicitor and his/her own client basis.

4. Le juge de la Cour Supérieure a déclaré cette clause invalide et a rejeté la réclamation de la Banque visant à récupérer les honoraires juridiques qu’elle a encourus.

Décision du juge [1]

Sur la question des frais juridiques du prêteur encourus pour poursuivre la Caution, voici le point central de la décision de la Cour d’appel :

« I believe that, in 2021, it is appropriate to declare, in principle, that fee reimbursement clauses, even in contracts of adhesion, are not necessarily abusive (and thus invalid), but their enforcement is subject to control by the courts so that the right to claim fees is exercised reasonably and in good faith.”

Usant de sa discrétion, la Cour d’appel a toutefois déterminé que dans ce cas et en l’absence d’une preuve adéquate, la somme de 31 000 $ en frais d’avocats pour réclamer 35 000 $ était déraisonnable et a réduit la somme de 31 000 $ à 12 000 $. Au-delà des montants impliqués, l’intérêt du jugement est de confirmer la validité de ce type de clause.

En tenant compte de ce qui précède, voici l’essentiel de ce qui doit être retenu ou considéré :

  1. Ce principe vaut tant pour une caution que pour l’emprunteur lui-même;
  2. Le droit du prêteur de récupérer les honoraires juridiques ne découle pas de la loi, mais ce droit doit être contractuellement prévu et accepté par les parties concernées;
  3. Ce droit n’est pas absolu, le prêteur doit faire la preuve du montant des honoraires réclamés et de leur caractère raisonnable, le tribunal conservant le droit de mitiger la réclamation si le montant réclamé n’est pas raisonnable eu égard aux circonstances particulières du dossier;
  4. S’il est maintenant reconnu que les frais juridiques peuvent être récupérés d’un emprunteur, il faut savoir que ce montant n’est pas garanti par l’hypothèque en faveur du prêteur.

En effet, l’article 2762 C.c.Q. exclut spécifiquement ce montant des obligations garanties par une hypothèque. Autrement dit, l’obligation de l’emprunteur de rembourser les frais légaux de son prêteur est une dette personnelle, non garantie.  Par ailleurs, si le prêteur obtient un jugement pour obtenir le remboursement de ses frais légaux, il faut savoir que : (i) la créance qui découle du jugement est valable pour 10 ans et n’est pas assujettie à la prescription de 3 ans (ii) ce jugement peut être exécuté sur tous les biens du débiteur et (iii) il permet aussi au prêteur d’acquérir une hypothèque légale sur tous les biens du débiteur du jugement.

Suggestions

Selon les formulaires utilisés par un prêteur, il pourrait être approprié de s’assurer que les conventions et offres de prêt prévoient que l’emprunteur est responsable du paiement des frais juridiques encourus par le prêteur pour obtenir un jugement contre l’emprunteur.  De même, les formulaires de cautionnement devraient également contenir une clause par laquelle la caution s’engage à rembourser les frais juridiques encourus pour obtenir un jugement contre la caution.

Dans le cas d’une caution, si son engagement est limité, il y aurait lieu de spécifier que l’engagement de rembourser les frais juridiques est en sus de la limite.


[1]     Les motifs de la Cour d’appel ont été rendus par Mark Schrager, J.C.A.