Le Québec est bien connu dans l’industrie pour les obligations légales strictes qu’il impose aux assureurs en ce qui concerne l’obligation de défendre en vertu du Code civil du Québec (« C.c.Q. »). Dans une affaire entendue récemment par la Cour supérieure du Québec, Bridor inc. c. 90784497 Québec inc. (2022 QCCS 2496 [CanLII]), la Cour a examiné la vraie nature de la police de chantiers afin de déterminer si l’assureur pouvait être forcé d’assumer la défense de son assuré. La Cour a statué que l’obligation légale de défendre ne s’applique pas à une police d’assurance de chantiers, étant donné qu’il s’agit d’une « assurance de biens » et non d’une « assurance de responsabilité ».
Bridor inc. (« Bridor ») avait retenu les services de Mikado Construction (« Mikado ») pour la supervision des travaux d’agrandissement entrepris à l’une de ses usines. Bridor a par la suite intenté une poursuite contre Mikado pour des dommages causés aux panneaux composites.
Mikado a présenté une demande de type Wellington contre Starr Insurance & Reinsurance (« Starr »), l’assureur auprès duquel Mikado a souscrit sa police d’assurance de chantiers, en vue d’obtenir une ordonnance obligeant Starr à assumer sa défense.
Étant donné que les dommages allégués aux panneaux composites sont susceptibles de faire l’objet d’une indemnisation en vertu de la police d’assurance de chantiers, Mikado prétendait que Starr était obligée d’assumer sa défense dans le cadre de l’action intentée par Bridor.
La Cour a rejeté cet argument. Pour que le raisonnement de Mikado s’applique, l’obligation de défendre doit être prévue soit par la police, soit par la loi.
La section du C.c.Q. portant sur l’assurance de dommages contient deux sous-sections : l’assurance de responsabilité et l’assurance de biens. La disposition qui impose aux assureurs l’obligation de défendre, l’article 2503 C.c.Q., se trouve dans la section sur l’assurance de responsabilité. Par conséquent, la Cour a conclu que cette obligation de défendre s’applique uniquement en matière d’assurance de responsabilité, non en matière d’assurance de biens.
La Cour s’est ensuite attachée à déterminer à quelle catégorie d’assurance une police d’assurance de chantiers appartient. Ce type de police utilisé dans l’industrie de la construction vise à éviter les situations dans lesquelles des parties engagées sur un même chantier se poursuivent mutuellement en cas de sinistre, ce qui aurait comme effet d’empêcher une reconstruction rapide. La Cour a conclu qu’une police d’assurance de chantiers se veut une assurance de biens.
Étant donné que le C.c.Q. n’impose pas d’obligation de défendre et que la police d’assurance de chantiers ne prévoyait aucune obligation de défendre, la poursuite de Mikado a été rejetée.
Bien que l’obligation de défendre en vertu des lois en vigueur au Québec puisse, dans bien des cas, sembler stricte pour les assureurs, cette décision confirme que les polices d’assurance de chantiers sont un type de police dans le cadre duquel un assureur n’est pas tenu d’assumer la défense de ses assurés si l’obligation n’est pas expressément prévue par la police.