Le 11 mars 2021, la Loi modifiant principalement la Loi sur la qualité de l’environnement en matière de consigne et de collecte sélective, L.Q. 2021, c. 5 (ci-après la « Loi ») a été adoptée. La Loi introduit de nouvelles dispositions ayant pour objectif de remplacer les programmes actuels de gestion des contenants, des emballages et des imprimés, par de nouveaux systèmes modernisés et plus efficaces basés sur le concept de la responsabilité élargie des producteurs. Cette loi s’inscrit dans le cadre de nombreux amendements récents apportés aux lois et règlements en matière d’environnement et fait plus particulièrement suite au Plan d’action 2011-2015 de la Politique québécoise de gestion des matières résiduelles.

Conformément à la Loi, le Règlement portant sur un système de collecte sélective de certaines matières résiduelles (ci-après le « Règlement sur le système de collecte sélective ») et le Règlement visant l’élaboration, la mise en œuvre et le soutien financier d’un système de consigne de certains contenants (ci-après le « Règlement sur le système de consigne ») sont officiellement entrés en vigueur le 7 juillet 2022. [1]

Les règlements ajoutent certaines matières et certains contenants à ceux visés par les systèmes existants et harmonisent les matières acceptées pour la collecte sélective dans les différentes régions du Québec afin d’en assurer le traitement adéquat. Par exemple, le système de consigne a été élargi pour inclure les contenants d’au moins 100 ml et d’au plus 2L de boissons « prêtes à boire », à l’exclusion des boissons lactées. Quant au système de collecte sélective, il visera désormais les livres dont la durée de vie utile est de moins de cinq ans  ainsi que les matières utilisées pour supporter ou présenter un produit à l’une ou l’autre des étapes les menant du producteur à l’utilisateur ou au consommateur final. Le système de collecte sélective visera également les matières à usage unique ou dont la durée de vie utile est de moins de cinq ans conçus pour la préparation ou la consommation d’un produit alimentaire, comme les pailles et les ustensiles.

L’objectif de ces règlements est d’augmenter la responsabilité des producteurs qui mettent en marché, vendent ou distribuent des imprimés ou des produits nécessitant des contenants ou des emballages et qui génèrent des matières résiduelles. Cet objectif s’articule autour de plusieurs obligations relatives à l’élaboration, à la mise en œuvre et au financement de ces systèmes, et plus particulièrement en ce qui concerne le transport, le tri, le conditionnement et la valorisation des contenants et des matières résiduelles. Tout en élargissant la responsabilité des producteurs, les règlements ont aussi indirectement pour effet de sensibiliser les consommateurs aux coûts associés à la gestion des déchets. En effet, les coûts afférents à ces systèmes doivent être internalisés dans le prix de vente. Par ailleurs, on note une intention d’encourager la participation citoyenne dans la gestion des déchets en augmentant le montant des consignes.

Les obligations imposées aux producteurs en vertu de ces règlements sont assumées par les organismes de gestion désignés par la Société québécoise de récupération et de recyclage (ci-après « Recyc-Québec ») pour chaque système. À compter du 24 octobre 2022 et pour une durée de cinq ans, Éco Entreprises Québec (ÉEQ) a été désigné pour agir au nom des producteurs aux fins du Règlement sur le système de collecte sélective alors que l’Association québécoise de récupération des contenants de boissons (AQRCB) a été désignée pour remplir la même fonction dans le cadre du Règlement sur le système de consigne.

Les producteurs sont tenus de devenir membres des organismes désignés et de contribuer financièrement à leur fonctionnement et à la gestion de chaque système de gestion des déchets. Le transfert de l’obligation de fournir des services, auparavant assumée par les municipalités du Québec, aux organismes de gestion désignés, en lieu et place des producteurs, se reflète également dans le modèle de financement des systèmes. Autrefois basé sur la compensation, on assiste maintenant à un changement vers un modèle axé sur le financement, qui commence dès la phase de développement et de mise en œuvre des systèmes. On s’attend également à ce que la gestion des déchets fasse l’objet d’un contrôle et d’une transparence accrus en raison de l’obligation des organismes désignés de rendre compte de leur gestion, notamment en ce qui concerne la réalisation des objectifs fixés par règlement.

À partir de 2026 et 2027, les règlements prévoient une augmentation des taux minimaux de récupération et de valorisation à atteindre pour chaque contenant ou matière résiduelle. En vertu du Règlement sur le système de consigne, ces taux augmenteront périodiquement pour atteindre des taux de récupération et de valorisation de 90 % pour tous les types de contenants respectivement en 2034 et 2036, sauf pour les contenants à remplissage unique en fibre qui bénéficieront de quatre années supplémentaires.  Quant aux matières résiduelles visées par le Règlement sur le système de collecte sélective, les taux minimaux de récupération atteindront entre 85 % et 90% d’ici 2042, à l’exception de l’aluminium et des plastiques souples. Quant aux taux de récupération de toutes les matières résiduelles, ils atteindront entre 75 % et 85 % d’ici 2050.

Qui plus est, les règlements misent sur la proximité des systèmes avec leurs utilisateurs en prévoyant des taux minimaux de valorisation locale, c’est-à-dire la valorisation réalisée dans les provinces ou états rapprochés, avec un poids plus important accordé à la valorisation réalisée au Québec. On remarque également l’intention d’assurer une gestion responsable et adéquate des déchets en imposant une obligation de traçabilité des déchets depuis leur collecte jusqu’à leur destination finale.

Dans le cas où les taux minimaux, incluant les taux de valorisation locale, prévus par les règlements ne sont pas atteints, l’organisme de gestion désigné doit transmettre à Recyc-Québec et au Ministre de l’Environnement, de la Lutte contre les changements climatiques, de la Faune et des Parcs un plan de redressement détaillant les mesures qui seront prises pour atteindre ces taux minimaux dans un délai de deux ans, ainsi que prévoyant le financement nécessaire à la mise en œuvre de ces mesures correctives. Les règlements prévoient également diverses sanctions administratives pécuniaires et infractions afin d’en assurer le respect. Celles-ci peuvent atteindre dans certains cas 1.000.000 $ pour un individu et 6.000.000 $ pour une personne morale.

Dans l’ensemble, un certain nombre de changements indiquent un effort du gouvernement pour moderniser les systèmes de collecte sélective et de consigne. Ces changements s’inscrivent également dans les objectifs du Plan pour une économie verte 2030, qui prévoit notamment la réduction des déchets et une meilleure gestion des matières résiduelles. Rappelons que les émissions provenant des lieux d’enfouissement des déchets génèrent une quantité importante de méthane, soit de gaz à effet de serre. Ainsi, ces nouveaux règlements sont sans aucun doute des outils importants dont se dote le gouvernement québécois afin d’atteindre ses objectifs de réduction des émissions de gaz à effet de serre menant à la neutralité carbone d’ici 2050.

[1] Décrets 972-2022 et 973-2022 du 8 juin 2022.