Introduction

Le 30 mars 2023, la Bourse des valeurs canadiennes (la « CSE » ou la « Bourse ») a obtenu l’approbation finale requise pour modifier ses politiques (les « modifications »). En vigueur depuis le 3 avril 2023, les modifications remanient de façon importante les politiques de la CSE, notamment par la création d’une nouvelle catégorie de grands émetteurs, appelés « émetteurs non émergents », et d’un programme pour les sociétés d’acquisition à vocation spécifique (SAVS) qui se compare au programme des sociétés de capital de démarrage de la Bourse de croissance TSX.

Le présent article, le deuxième d’une série en deux parties que Miller Thomson consacre aux modifications, intéressera tout particulièrement les sociétés actuellement inscrites à la cote de la CSE. Il y sera question, dans le prolongement de l’article précédent, des modifications apportées aux exigences d’inscription initiales de la Bourse, dont celles qui s’appliquent aux émetteurs non émergents et aux SAVS. Nous y présenterons aussi les changements récents au Formulaire 2A – Déclaration d’inscription à la cote de la CSE.

Examen de l’admissibilité

Dans le cadre des modifications, la CSE a instauré un examen de l’admissibilité obligeant les sociétés à obtenir la confirmation qu’elles satisfont aux exigences d’admissibilité de la Bourse si elles comptent s’inscrire à sa cote en même temps qu’elles déposent un prospectus, ou immédiatement après. Pour l’examen, les sociétés doivent présenter un document suffisamment détaillé, comme un projet de prospectus. Dans le cas des émetteurs du secteur des ressources naturelles, le document doit comprendre le rapport technique approprié. Après l’examen, la CSE confirme l’admissibilité ou détermine les conditions que le demandeur doit remplir avant l’inscription.

Exigences relatives au flottant

La CSE exige désormais de l’émetteur de titres de participation un flottant d’au moins 1 000 000 actions librement négociables, constituant au moins 20 % du total émis et en circulation du titre. Auparavant, la Bourse exigeait un flottant d’au moins 500 000 actions librement négociables, constituant 10 % du total émis et en circulation du titre.

Émetteurs du secteur des ressources naturelles

Les critères d’inscription applicables aux entreprises du secteur des ressources naturelles ont changé. Une société d’exploration minière doit désormais avoir engagé des « dépenses admissibles » d’au moins 150 000 $ (auparavant 75 000 $) au cours des 36 derniers mois. Elle doit aussi avoir obtenu un rapport indépendant qui est conforme aux exigences de la Norme canadienne 43-101, Information concernant les projets miniers et qui recommande de futures explorations sur la propriété, et être dotée d’un budget d’au moins 250 000 $ pour la première phase.

Si elle satisfait les exigences minimales d’inscription à la cote avec un seul projet d’exploration, elle doit communiquer ses objectifs de poursuivre d’autres projets ou possibilités d’exploration ou de rester dans le secteur de l’exploration minérale.

Nonobstant les exigences ci-dessus, l’inscription à la cote d’un émetteur peut être approuvée si elle comprend les trois éléments suivants :

  1. dépenses : des dépenses d’exploration admissibles d’au moins 75 000 $;
  2. budget : un budget de première phase d’au moins 100 000 $;
  3. entiercement : la société doit convenir d’être liée par des exigences supplémentaires en matière de blocage de titres prévues à la Politique 2 de la CSE, dont les suivantes : (i) toutes les actions du fondateur sont soumises à une convention de blocage de titres; (ii) la libération initiale du blocage de titres est assujettie à l’approbation de la Bourse et doit avoir lieu au plus tôt 10 jours après l’annonce publique des résultats de la première phase du programme; (iii) l’annulation de tous les titres entiercés restants en cas de radiation de la cote par la Bourse ou de l’annonce d’un changement d’activité ou d’un accord définitif concernant une opération qui constituerait un changement fondamental aux termes de la Politique 8 de la CSE.

Émetteurs non émergents

En plus de satisfaire aux exigences minimales d’inscription au moment de l’inscription, un émetteur qui satisfait aux exigences relatives aux émetteurs non émergents énoncées dans la Politique 2 de la CSE peut être considéré par la Bourse comme un émetteur non émergent. Pour être admissible à l’inscription, un émetteur non émergent doit respecter au moins l’une des quatre normes suivantes :

  1. norme relative à la participation : des fonds propres d’au moins 5 000 000 $ et une valeur au cours du marché du flottant attendue d’au moins 10 000 000 $;
  2. norme relative au bénéfice net : un bénéfice net d’au moins 400 000 $ tiré des activités poursuivies au cours du plus récent exercice financier ou de deux des trois plus récents exercices financiers, des fonds propres d’au moins 2 500 000 $, et une valeur au cours du marché du flottant attendue d’au moins 5 000 000 $;
  3. norme relative à la valeur au cours du marché : une valeur au cours du marché de tous les titres, à l’exclusion des bons de souscription et des options, d’au moins 50 000 000 $, des fonds propres d’au moins 2 500 000 $, y compris la valeur de toute offre concomitante de l’inscription, et une valeur du flottant sur le marché attendue d’au moins 10 000 000 $;
  4. norme relative aux actifs et aux revenus : des actifs globaux et des revenus globaux d’au moins 50 000 000 $, respectivement, au cours du dernier exercice ou de deux des trois derniers exercices financiers, et une valeur du flottant sur le marché attendue d’au moins 5 000 000 $.

La CSE peut désigner un émetteur inscrit comme émetteur non émergent si sa capitalisation ou ses activités sont suffisamment avancées pour qu’il se rapproche des seuils d’au moins deux des quatre normes ci-dessus. Elle peut faire cette désignation si elle juge qu’il serait dans l’intérêt du public de le faire.

Au-delà des nouvelles exigences d’inscription, les exigences relatives à la valeur minimale du flottant sont aussi plus élevées pour les émetteurs non émergents que pour les autres émetteurs. Selon la Politique 2, un émetteur non émergent doit avoir un flottant public d’au moins 1 000 000 de titres librement négociables et au moins 300 détenteurs publics détenant chacun au moins un lot régulier (contre 150 détenteurs publics pour les autres émetteurs). Les émetteurs non émergents doivent aussi remplir chaque année certaines conditions de maintien de l’inscription, dont un flottant public constitué de 500 000 actions d’une valeur minimale de 2 000 000 $. Ils doivent également maintenir un bénéfice net d’au moins 100 000 $ tiré des activités poursuivies ou une valeur au cours du marché des titres inscrits d’au moins 3 000 000 $.

Il importe de noter que les lois canadiennes sur les valeurs mobilières, comme le Règlement 51-102 sur les obligations d’information continue, définissent un « émetteur émergent » comme un émetteur assujetti qui n’a pas de titres inscrits à la cote de la Bourse de Toronto, de La Neo Bourse Aequitas (aujourd’hui Cboe Canada), d’un marché américain comme le NASDAQ ou la Bourse de New York ou de certaines autres places boursières. Cela signifie qu’à moins d’être aussi inscrite à l’une des bourses précitées, une société inscrite à la CSE comme émetteur non émergent serait assujettie aux exigences que ces lois fixent de manière générale pour encadrer les « émetteurs émergents ». Aux termes de la Politique 5 de la CSE, l’émetteur non émergent est cependant tenu de déposer un Formulaire 51-102F2 – Notice annuelle, au plus tard 90 jours suivant la fin de son exercice financier.

SAVS

L’introduction des SAVS à la Bourse fait partie des grands changements apportés par les modifications. Une SAVS est un instrument de placement qui offre à des sociétés fermées un moyen non traditionnel d’ouvrir leur capital. Comparativement au premier appel public à l’épargne (PAPE) classique, le programme des SAVS permet à des sociétés sans actifs ni activités commerciales autres que des liquidités de réaliser un PAPE à la CSE. Dans les 36 mois suivant le placement aux termes de son prospectus, la SAVS doit réaliser un premier regroupement (une « acquisition admissible ») qui respecte les exigences de la CSE et qui lui permet de continuer à négocier des titres à la CSE.

Une SAVS doit soumettre une demande d’inscription à la cote démontrant qu’elle est en mesure de satisfaire aux exigences d’inscription de la Bourse. La Bourse peut accorder ou refuser la demande en fonction de divers critères, dont l’expérience des dirigeants et des administrateurs de la SAVS, la nature de leur rémunération et la répartition de la participation dans la SAVS.

L’annexe 2C de la Politique 2 énonce les exigences d’inscription de la CSE applicables aux SAVS. Les changements notables sont les suivants :

  • société n’étant pas en exploitation : l’émetteur ne doit pas exploiter une entreprise active ou avoir conclu un accord d’acquisition contraignant relatif à une acquisition admissible;
  • montant minimal à mobiliser : la SAVS doit amasser un minimum de 30 000 000 $ au moyen de la vente d’actions ou d’unités par l’intermédiaire d’un placement par voie de prospectus (une unité ne peut contenir plus d’une action et plus de deux bons de souscription);
  • flottant : au moins 1 000 000 de titres librement négociables; valeur de marché globale des titres détenus d’au moins 30 000 000 $; au moins 150 actionnaires publics, détenant chacun au moins un lot régulier;
  • prix minimal : le prix minimal d’émission du PAPE est de 2,00 $ par action ou par unité;
  • exigences en matière d’entiercement : jusqu’à la réalisation de l’acquisition admissible, 90 % du produit brut du PAPE (y compris les commissions reportées des placeurs) doivent être remis à un agent d’entiercement.

L’émetteur inscrit issu de l’acquisition admissible réalisée par la SAVS dispose de 90 jours, par la suite, pour satisfaire aux exigences d’inscription de la Bourse applicables aux émetteurs non émergents.

Changements récents au Formulaire 2A – Déclaration d’inscription à la cote

Le 18 mai 2023, la Bourse a approuvé des changements importants à son Formulaire 2A – Déclaration d’inscription à la cote. Ces changements visent à clarifier les exigences d’information liées à la Déclaration, qui autorisent désormais le renvoi aux exigences d’information fixées pour le prospectus ordinaire. Les modifications établissent en effet qu’une Déclaration d’inscription à la cote doit contenir les informations prescrites par l’Annexe 41-101A1 – Information à fournir dans le prospectus. De plus, dans certaines situations, les obligations d’information peuvent être satisfaites par renvoi à des documents d’information existants, par exemple en incluant dans une Déclaration d’inscription à la cote un renvoi à un prospectus pour lequel un visa définitif a été délivré par une autorité en valeurs mobilières au Canada, ou encore un renvoi à une circulaire de sollicitation de procurations, pourvu qu’elle contienne des renseignements aussi détaillés que dans le prospectus et qu’elle ait été déposée sur SEDAR et envoyée aux actionnaires.

Conclusion

Les modifications constituent une refonte importante des politiques de la CSE, désormais plus en phase avec celles des autres bourses canadiennes. Elles sont entrées en vigueur le 3 avril 2023, tandis que les changements au Formulaire 2A ont pris effet le 18 mai 2023.

Si vous avez des questions sur les modifications ou souhaitez en savoir plus, n’hésitez pas à communiquer avec un membre du groupe Marchés financiers et valeurs mobilières de Miller Thomson.