Le Canada fait actuellement face à une incertitude concernant la nouvelle série de tarifs imposés par les États-Unis.
L’imposition des tarifs va avoir un impact considérable sur plusieurs secteurs clés de l’économie canadienne, notamment l’industrie automobile, l’acier et l’aluminium, qui sont particulièrement vulnérables à ces taxes. Le gouvernement du Canada suit la situation de près et réagit en imposant des tarifs de rétorsion afin de protéger les intérêts du Canada et de soutenir les entreprises canadiennes.
Les tarifs auront des répercussions significatives pour les parties contractantes, notamment en ce qui concerne les prix convenus dans leurs accords et la détermination de la partie responsable du paiement des droits de douane.
Modalités des contrats, un élément essentiel
Les modalités du contrat seront un facteur clé pour déterminer quelle partie assume les frais de douane pour un produit destiné à être importé aux États-Unis ou inversement au Canada, étant donné que des tarifs de rétorsion ont désormais été annoncés. Même en l’absence d’une telle clause, l’augmentation des tarifs risque d’entraîner une hausse des coûts de fabrication.
En l’absence de précision dans le contrat, de nombreuses entreprises se demandent quelle partie devra assumer les coûts liés aux tarifs et si cette situation pourrait constituer un cas de force majeure, permettant à une des parties de se libérer de ses obligations contractuelles devenues trop onéreuses ou, du moins, de les atténuer.
Bien qu’aucune décision de la cour au Québec n’ait encore statué sur la question de savoir si l’imposition de tarifs élevés peut être considérée comme un cas de force majeure permettant à une partie de se dégager d’une obligation, la jurisprudence issue de la pandémie de Covid-19 a créé un précédent important en matière de force majeure.
Le principe de la force majeure
La force majeure permet aux parties de se dégager de leurs responsabilités contractuelles lorsqu’un événement imprévisible, irrésistible et extérieur survient. Un événement est considéré comme imprévisible si les parties ne pouvaient pas anticiper, au moment de la conclusion du contrat, qu’il se produirait.
Chaque situation de force majeure est évaluée au regard de ses circonstances particulières à chaque dossier.
À ce titre, la Cour supérieure a rejeté la défense d’une entreprise qui demandait l’annulation d’un contrat en raison de la pandémie de Covid-19. La Cour a observé que la pandémie avait rendu les obligations plus complexes, mais non impossibles. L’absence de l’irrésistibilité a empêché la Cour de qualifier la pandémie de force majeure.
En effet, le principe de force majeure est interprété de manière stricte par les tribunaux du Québec et nécessite des circonstances exceptionnelles.
Une obligation n’est pas considérée comme impossible à exécuter simplement parce qu’elle devient plus coûteuse ou plus complexe à réaliser. De plus, dans un contexte où il y a une augmentation des tarifs – souvent considérée comme un risque connu -, il sera intéressant de voir si les tribunaux estimeront que cela constitue une situation imprévisible.
Cela soulève la question de savoir si une partie peut véritablement invoquer la force majeure pour se libérer de ses obligations contractuelles, si l’événement en question aurait pu être anticipé ou pris en compte lors des négociations contractuelles.
À titre d’illustration, l’absence de marché pour le carton et la pâte à papier a déjà été interprétée par la Cour suprême du Canada comme ne constituant pas une force majeure, et n’a donc pas suffi à libérer une partie de ses obligations contractuelles.
Les circonstances propres à chaque dossier joueront un rôle déterminant dans l’analyse que devront effectuer les tribunaux québécois, qui devront certainement se prononcer sur cette question.
La clause contractuelle de force majeure
Il est également essentiel de vérifier si votre contrat comporte une définition plus large de la force majeure, ce qui pourrait vous permettre de l’invoquer à l’encontre de vos obligations contractuelles.
En effet, le principe de la force majeure n’est pas une question d’ordre public, et les tribunaux québécois ont déjà jugé que les parties sont libres de définir les modalités d’une clause de force majeure dans leur contrat. Elles peuvent adapter les critères de cette clause en fonction de la nature de leurs relations contractuelles, ce qui leur permet de spécifier ce qui peut être considéré comme un cas de force majeure.
À titre d’illustration, la Cour d’appel du Québec a jugé que les fluctuations du marché peuvent constituer un cas de force majeure lorsqu’elles sont expressément prévues dans un contrat et que les conditions de la force majeure sont remplies.
Il est donc essentiel de procéder à une analyse détaillée de votre contrat pour déterminer si l’imposition de nouveaux tarifs pourrait éventuellement être qualifiée de force majeure contractuelle.
Comment se protéger?
Il reste à voir si les tribunaux canadiens considéreront les tarifs imposés par le président Trump et les tarifs de rétorsion canadiens comme un événement de force majeure.
Toutefois, au vu des précédents judiciaires, il est fort probable que l’analyse des effets des tarifs sur les relations contractuelles entre les parties sera menée en fonction des spécificités de chaque dossier.
Votre contrat pourrait également inclure des clauses permettant la renégociation de certains aspects en cas de changements imprévus, notamment des dispositions concernant l’augmentation des coûts, l’ajustement des termes contractuels en raison de circonstances imprévues ou encore des clauses de résiliation anticipée.
Il est donc crucial de procéder à un examen approfondi de vos contrats afin d’identifier vos droits et obligations.
L’équipe pancanadienne et multidisciplinaire de Miller Thomson est à votre disposition pour analyser vos contrats et élaborer des stratégies de protection sur mesure. Nous vous accompagnons dans ces périodes complexes en vous fournissant des conseils stratégiques adaptés, tout en assurant la protection juridique de vos intérêts dans un environnement en constante évolution.