Le 28 mars 2023 (le « jour du budget »), la ministre des Finances du Canada (et vice-première ministre) a présenté le budget fédéral du Canada pour l’année 2023 (le « budget de 2023 »).
Mêmes si ce budget contient certaines bonnes nouvelles dans la mesure où il ne propose pas d’augmentation des taux d’imposition ni de réduction des avantages qui nous sont chers (p. ex., le taux d’inclusion des gains en capital), il y a lieu de tempérer les bonnes nouvelles pour certains contribuables, car le budget de 2023 vient préciser certaines réformes qui avaient déjà été annoncées concernant le taux de l’impôt minimum de remplacement et il étend la portée de la règle générale anti-évitement.
Le budget de 2023 comprend également de plus amples renseignements sur plusieurs autres mesures annoncées antérieurement, notamment concernant les crédits d’impôt à l’investissement pour les technologies à zéro émission et la production d’énergie propre et la taxe des rachats d’actions par les sociétés cotées en bourse. Les autres propositions d’intérêt dans ce budget sont les modifications proposées aux règles qui accompagnent la Loi de l’impôt sur le revenu (Canada) (la « Loi de l’impôt ») instaurées par le projet de loi C-208 pour renforcer le cadre des transferts intergénérationnels d’entreprises et des propositions concernant la création et l’utilisation de fiducies collectives des employés pour acquérir et détenir des actions d’une entreprise.
Nous vous présentons ci-dessous un résumé des récentes annonces, ainsi que d’autres propositions contenues dans le budget de 2023 à l’égard desquelles nos clients pourraient avoir un intérêt.
I. Mesures visant l’impôt sur le revenu des particuliers
1. Fiducies collectives des employés
À la suite des annonces faites dans les budgets fédéraux de 2021 et de 2022 consistant à envisager la création et l’utilisation de fiducies collectives des employés (les « FCE ») comme option supplémentaire de planification de la succession pour les propriétaires d’entreprises au Canada et visant à examiner les obstacles qui se présentent lors de la constitution d’une FCE, le budget de 2023 propose de nouvelles règles pour faciliter l’utilisation des FCE dans le but d’acquérir et de détenir des actions d’une entreprise. Les nouvelles règles s’appliqueront aux opérations effectuées à partir du 1er janvier 2024.
Actuellement, lorsqu’un propriétaire d’une entreprise privée envisage une stratégie de sortie, les options qui s’offrent à lui sont les suivantes; i) une vente sans lien de dépendance; ii) une planification de la succession familiale; ou iii) un rachat par la direction. La constitution d’une FCE devrait créer une autre option viable en permettant généralement aux employés de l’entreprise d’acquérir et de détenir des actions de l’entreprise par l’entremise d’une FCE sans les obliger à payer directement pour acquérir les actions. Au lieu de cela, la FCE obtiendrait généralement un financement par emprunt afin d’acheter les actions et ce prêt serait remboursé par la FCE au fil du temps à l’aide des bénéfices engrangés par l’entreprise acquise qui sont distribués à la FCE.
On entend par « fiducie collective des employés » une fiducie irrévocable qui réside à tout moment au Canada (à l’exclusion des fiducies réputées résidentes) dont la totalité ou la quasi-totalité de la juste valeur marchande des biens est attribuable à des actions d’une « entreprise admissible » que la fiducie contrôle, directement ou indirectement, et qui est exclusivement au profit de personnes physiques qui sont les bénéficiaires de la fiducie et qui doivent toutes être employées par l’entreprise admissible. La définition impose également des restrictions à la propriété d’actions par ces bénéficiaires en dehors de la fiducie, ce qui limite la propriété individuelle à moins de 10 % de toute catégorie et la propriété de personnes liées à moins de 50 % de toute catégorie. Les bénéficiaires ne peuvent pas non plus être une personne qui détient, avec des personnes liées ou affiliées, 50 % ou plus des actions de l’entreprise admissible avant le transfert admissible.
L’intérêt des bénéficiaires dans une FCE doit être établi selon i) les heures d’emploi; ii) les salaires et autres rémunérations; et iii) la durée totale de l’emploi. Il sera également interdit à la FCE de distribuer les actions à tout bénéficiaire de la fiducie et d’agir dans l’intérêt d’un bénéficiaire au détriment d’un autre. La définition de la FCE exige que les fiduciaires aient le même droit de vote dans la conduite des affaires de la fiducie et qu’ils soient soit une société de fiducie autorisée, soit une personne physique élue par les bénéficiaires pour une période n’excédant pas cinq ans. Il convient d’examiner si l’interdiction de distribuer des actions aux bénéficiaires de la FCE entraînera l’application des règles de perpétuité dans la province dans laquelle la FCE est constituée.
En règle générale, une « entreprise admissible » est une société contrôlée par la FCE qui est une société privée sous contrôle canadien (« SPCC ») dont la totalité ou la quasi-totalité de la juste valeur marchande des actifs à ce moment-là est attribuable à des actifs utilisés principalement dans une entreprise active exploitée principalement au Canada par la société. Un maximum de 40 % des administrateurs de la société peuvent être des personnes qui, avec des personnes liées et affiliées, détenaient 50 % ou plus des actions de la société avant son acquisition par la FCE. L’entreprise admissible ne doit également avoir aucun lien de dépendance et ne pas être affiliée à une personne qui possédait 50 % ou plus de la juste valeur marchande des actions de la société avant l’acquisition par la FCE.
Une cession sera généralement considérée comme un « transfert d’entreprise admissible » par un contribuable s’il s’agit d’une cession d’actions d’une société à une FCE ou à une SPCC contrôlée par une FCE, à condition que i) immédiatement avant la cession, la totalité ou la quasi-totalité des actifs de la société soient utilisés dans le cadre d’une entreprise exploitée activement et principalement au Canada, ii) au moment de la cession, le contribuable n’ait aucun lien de dépendance avec la FCE ou la SPCC qui acquiert le contrôle de la société, et iii) à tout moment après la cession, le contribuable n’ait aucun lien de dépendance avec la société, la FCE et la SPCC, et qu’il ne conserve pas le contrôle de facto de la société.
Un prêt d’actionnaire consenti par une entreprise admissible à une FCE dans le cadre d’un transfert d’entreprise admissible ne sera pas inclus dans le revenu de la fiducie en vertu du paragraphe 15(2) de la Loi de l’impôt, à condition que le seul objectif du prêt soit de faciliter le transfert de l’entreprise admissible et que des dispositions de bonne foi soient prises pour son remboursement dans les 15 ans qui suivent le transfert. Cette mesure semble autoriser l’utilisation des liquidités de l’entreprise cible pour financer l’acquisition.
De plus, la réserve de gains en capital qu’un contribuable peut demander sur la vente des actions d’une entreprise admissible dans le cadre d’un transfert d’entreprise admissible à une FCE passera de 5 ans à 10 ans.
Une FCE sera exemptée de la règle de disposition présumée de 21 ans généralement applicable aux fiducies entre vifs. Sans cette mesure, en pratique, une FCE ne durerait que 21 ans environ.
Le revenu non réparti de la FCE serait imposé au taux d’imposition marginal supérieur du revenu des particuliers, tandis que le revenu d’une FCE distribué à ses bénéficiaires ne serait pas imposable au niveau de la fiducie, mais au niveau des bénéficiaires et les dividendes reçus par la FCE d’une entreprise admissible, et distribués aux employés bénéficiaires conserveront leur caractère de dividendes pour les bénéficiaires, ce qui les rendra admissibles au crédit d’impôt sur les dividendes. Cette mesure est importante pour veiller à ce que les employés bénéficiaires reçoivent également le traitement fiscal approprié du régime de la FCE.
2. Impôt minimum de remplacement pour les particuliers à revenu élevé
Le budget de 2023 propose plusieurs changements au régime de l’impôt minimum de remplacement (« IMR ») qui viseraient les personnes à revenu élevé. Ces changements comprennent l’élargissement de l’assiette de l’IMR, l’augmentation de l’exemption de l’IMR et l’augmentation du taux de l’IMR.
Les mesures visant à augmenter l’assiette de l’IMR comprennent l’augmentation du taux d’inclusion des gains en capital de l’IMR de 80 % à 100 %, l’inclusion de 100 % de l’avantage lié aux options d’achat d’actions des employés et l’inclusion de 30 % des gains en capital sur les dons de titres cotés en bourse. L’assiette de l’IMR serait également augmentée en supprimant 50 % de certaines déductions, notamment les dépenses d’emploi (autres que celles visant à gagner un revenu de commission), les déductions pour les cotisations versées au Régime de pensions du Canada, au Régime de rentes du Québec et au régime d’assurance parentale provincial, les frais de déménagement, les frais de garde d’enfants et autres. De plus, seulement 50 % des crédits d’impôt non remboursables seraient accordés en vue de réduire l’IMR, sous réserve de certaines exceptions.
Le budget de 2023 propose d’augmenter le montant de l’exemption de l’IMR de 40?000 dollars au montant au bas de la quatrième tranche d’imposition fédérale. Ce montant anticipé devrait s’élever à 173?000 dollars pour 2024, en tenant compte de l’inflation prévue, et serait indexé à l’inflation chaque année. Il est également proposé d’augmenter le taux de l’IMR à 20,5 % comparativement à 15 % actuellement.
Les modifications proposées entreraient en vigueur pour les années d’imposition qui commencent après 2023.
3. Renforcer le cadre des transferts intergénérationnels d’entreprises
Le budget de 2023 propose de modifier certaines dispositions de la Loi de l’impôt, plus particulièrement l’article 84.1 de la Loi de l’impôt, dans le but déclaré de veiller à ce que les règles instaurées par le projet de loi C-208 dans la Loi de l’impôt en 2021 soient raffinées pour faciliter de véritables transferts intergénérationnels d’entreprises et pour s’assurer que des mesures de protection suffisantes soient en place pour éviter le risque d’évasion fiscale.
L’article 84.1 de la Loi de l’impôt est une règle anti-évasion conçue pour empêcher que l’excédent d’une société qui serait normalement imposé au taux d’imposition des dividendes ne soit converti en gain en capital imposé au taux d’imposition des gains en capital. L’article 84.1 s’applique lorsqu’un contribuable (autre qu’une société) cède des actions d’une société canadienne (la « société en cause ») à une autre société (la « société acheteuse ») avec laquelle il a un lien de dépendance et que, immédiatement après la cession, la société en cause est rattachée à la société acheteuse.
Le projet de loi C-208 a modifié l’article 84.1 afin qu’une opération avec lien de dépendance soit réputée être une opération sans lien de dépendance lorsqu’un contribuable vend des actions admissibles d’une petite entreprise (la « PE ») ou des actions du capital-actions d’une société agricole ou de pêche familiale (la « SAPFA ») à un acheteur qui est une société appartenant à un enfant ou à un petit-enfant du contribuable, sous réserve du respect de certaines conditions. Ces modifications ont pour but de permettre à un contribuable de bénéficier, lors de cette vente, du même traitement fiscal que lors d’une vente à un acquéreur n’ayant pas de lien de dépendance.
Les modifications proposées maintiennent la condition selon laquelle le traitement fiscal préférentiel ne peut être obtenu que lors de la vente d’actions de la PE ou de la SAPFA. Toutefois, d’autres conditions sont modifiées de manière significative afin de garantir que ce traitement ne sera disponible que pour les « véritables transferts intergénérationnels d’actions ». Il est proposé d’ajouter ces nouvelles conditions et les conditions révisées à la Loi de l’impôt afin de refléter les « caractéristiques » d’un véritable transfert intergénérationnel d’entreprise, comme publié dans le communiqué de presse du ministère des Finances le 19 juillet 2021;
- Le fait que le vendeur cesse lors du transfert d’avoir le contrôle de fait et le contrôle de droit de l’entreprise transférée;
- L’intention du nouveau propriétaire de poursuivre l’entreprise en tant qu’entreprise en exploitation longtemps après son acquisition;
- Le fait que le vendeur n’a aucun intérêt financier dans l’entreprise transférée après son transfert;
- Le fait que le vendeur ne participe pas à l’administration et à la gestion de l’entreprise après son transfert.
Les modifications proposées créent une approche à double régime qui offre une certaine souplesse dans la manière dont certains contribuables et leurs familles peuvent profiter des nouvelles règles. Les contribuables peuvent choisir l’une des deux options de transfert suivantes;
- Un transfert intergénérationnel d’entreprise immédiat (critère de trois ans) fondé sur des conditions de vente sans lien de dépendance.
- Un transfert intergénérationnel d’entreprise progressif (critère de cinq à dix ans) fondé sur les caractéristiques traditionnelles du gel successoral.
Plusieurs conditions doivent être réunies pour qu’un transfert intergénérationnel d’actions soit exclu de l’application de l’article 84.1 de la Loi de l’impôt, quel que soit le régime. La règle du transfert intergénérationnel immédiat donnerait une plus grande certitude plus tôt dans le processus, mais serait assortie de conditions plus strictes. La règle du transfert progressif d’entreprise offrirait une souplesse supplémentaire à des conditions reconnaissant que tous les transferts d’entreprise ne sont pas immédiats. Les conditions prévues par les deux régimes concernent le transfert du contrôle de l’entreprise, le transfert des intérêts économiques de l’entreprise, le transfert de la gestion de l’entreprise, la conservation du contrôle de l’entreprise par l’enfant et la participation active de l’enfant dans l’entreprise.
En plus des conditions mentionnées ci-dessus, l’auteur du transfert et l’enfant seraient tenus de faire un choix conjoint afin que le transfert soit admissible à titre de transfert intergénérationnel d’actions immédiat ou progressif. Aux fins de ce régime, le terme « enfant » comprend les petits-enfants, les enfants du conjoint, les conjoints des enfants, les nièces et neveux, et les petites-nièces et petits-neveux). L’enfant ou les enfants seraient solidairement responsables de tout impôt supplémentaire imposé si les conditions requises n’ont pas été respectées et qu’une réévaluation a été établie en vertu de l’article 84.1. Par ailleurs, le délai de prescription pour établir une nouvelle évaluation serait prolongé de trois ans pour un transfert d’entreprise immédiat et de dix ans pour un transfert d’entreprise progressif.
Toutes les modifications proposées aux règles de transfert intergénérationnel d’entreprise doivent s’appliquer aux opérations effectuées à compter du 1er janvier 2024.
II. Mesures visant l’impôt sur le revenu des sociétés
1. Mesures liées à l’environnement
Le budget de 2023 a annoncé plusieurs crédits d’impôt à l’investissement et d’autres mesures relatives à l’énergie propre, notamment;
- Crédit d’impôt à l’investissement pour l’hydrogène propre – À la suite de l’annonce du gouvernement dans l’Énoncé économique de l’automne de 2022, le budget de 2023 propose d’instaurer un nouveau crédit d’impôt à l’investissement pour l’hydrogène propre. Seuls les projets qui produisent la totalité, ou presque, de l’hydrogène dans le cadre de leur processus de production seraient admissibles à ce crédit d’impôt. Le taux de crédit applicable sera basé sur l’intensité en carbone de l’hydrogène qui est produit et se situe entre 15 % et 40 %. Le crédit d’impôt à l’investissement pour l’hydrogène propre serait entièrement éliminé pour les biens qui deviennent prêts à être mis en service après 2034.
- Crédit d’impôt pour l’investissement dans les technologies propres – Énergie géothermique – Le budget de 2023 propose d’élargir l’admissibilité du crédit d’impôt pour l’investissement dans les technologies propres, qui déjà a été annoncé dans l’énoncé économique de l’automne 2022, afin d’inclure les systèmes d’énergie géothermique admissibles à la catégorie 43.1 de l’annexe II du Règlement de l’impôt sur le revenu.
- Crédit d’impôt à l’investissement pour la fabrication de technologies propres – Le budget de 2023 propose un crédit d’impôt à l’investissement remboursable de 30 % pour les activités liées à la fabrication et à la transformation de technologies propres ainsi que pour l’extraction et la transformation de minéraux critiques. Ce crédit d’impôt à l’investissement s’applique au coût en capital des biens admissibles associés aux activités admissibles. Les biens admissibles comprennent les machines et équipements, certains véhicules industriels, utilisés dans la fabrication, la transformation ou l’extraction de minéraux critiques, ainsi que les systèmes de contrôle associés. Les activités admissibles comprennent; la fabrication d’équipements pour l’énergie solaire, éolienne, hydraulique, géothermique ou nucléaire ; le traitement ou le recyclage des combustibles nucléaires et de l’eau lourde ; la fabrication de barres de combustible nucléaire ; la fabrication d’équipements de stockage de l’énergie électrique utilisés pour fournir un stockage à l’échelle du réseau ou d’autres services auxiliaires ; la fabrication d’équipements pour les systèmes de pompes à chaleur aérothermiques et géothermiques ; et la fabrication de véhicules à zéro émission. Un seul des crédits pour la fabrication de technologies propres, les technologies propres, l’électricité propre et l’hydrogène propre peut être demandé lorsqu’un bien donné est admissible à plus d’un des crédits susmentionnés.
- Fabricants de technologies à zéro émission – Le budget 2021 a proposé une mesure temporaire visant à réduire de moitié les taux d’imposition sur le revenu des sociétés pour les fabricants de technologies à zéro émission qui remplissent les conditions requises. Le budget 2023 élargit les activités admissibles en proposant que les revenus provenant de la fabrication d’équipement d’énergie nucléaire, du traitement ou du recyclage de combustibles nucléaires et d’eau lourde, ainsi que de la fabrication de barres de combustible nucléaire, soient également admissibles aux taux d’imposition réduits. Le budget 2023 propose également de prolonger le taux d’élimination progressive prévu de manière à ce qu’il commence pour les années d’imposition commençant en 2032 et qu’il soit entièrement éliminé pour les années d’imposition commençant après 2034.
- Crédit d’impôt à l’investissement pour le captage, l’utilisation et le stockage du carbone – Le budget de 2023 propose des détails supplémentaires concernant le crédit d’impôt à l’investissement remboursable pour le captage, l’utilisation et le stockage du carbone qui a déjà été annoncé dans le budget 2022. Il s’agit notamment de la double utilisation de l’équipement, de l’ajout de la Colombie-Britannique comme territoire de compétence admissible, de la validation des exigences en matière de stockage concret, des interactions avec d’autres crédits d’impôt fédéraux, du traitement des coûts de remise à neuf, de la récupération des crédits d’impôt à l’investissement pour les activités de remise à neuf, de partage des connaissances et de communication des risques climatiques.
- Actions accréditives et crédit d’impôt pour l’exploration minière essentielle – Lithium provenant de saumure – Le budget de 2023 propose d’élargir le régime des actions accréditives pour inclure le lithium provenant de saumure dans les frais d’exploration au Canada (FEC) et dans les frais d’aménagement au Canada (FAC). Le crédit d’impôt non remboursable de 30 % pour l’exploration minière essentielle sera également élargi pour inclure le lithium provenant de saumure. L’amendement proposé s’appliquera aux conventions visant les actions conclues après le jour du budget et avant avril 2027.
Le budget de 2023 confirme également l’intention du gouvernement de mettre en œuvre le crédit d’impôt à l’investissement pour les technologies propres, qui a déjà été annoncé dans l’Énoncé économique de l’automne de 2022.
2. Impôt sur les rachats de capitaux propres
Dans l’Énoncé économique de l’automne de 2022, le gouvernement a annoncé son intention d’instaurer une taxe de 2 % sur les rachats d’actions par les sociétés publiques au Canada (la « taxe sur les rachats »). Le budget de 2023 comprend des renseignements plus détaillés à ce sujet et un projet de loi concernant la taxe sur les rachats, qui s’appliquera aux rachats et aux émissions d’actions à partir du 1er janvier 2024.
Le budget de 2023 propose que la taxe sur les rachats s’applique à toute personne qui est une « entité visée » qui comprend les sociétés résidant au Canada dont les actions sont cotées à une bourse de valeurs désignée (autres que les sociétés de fonds communs de placement), les fiducies de placement immobilier, les fiducies EIPD, les sociétés de personnes intermédiaires de placement déterminées et les entités cotées en bourse qui seraient des fiducies EIPD ou des sociétés de personnes intermédiaires de placement déterminées si leurs actifs étaient situés au Canada.
Le budget de 2023 propose que la taxe sur les rachats d’une entité visée pour une année d’imposition soit calculée comme 2 % de la différence entre;
- La juste valeur marchande totale des capitaux propres de l’entité visée (sauf exceptions spécifiques) qui sont rachetés, acquis ou annulés au cours de l’année d’imposition par l’entité visée;
- La juste valeur marchande totale des capitaux propres de l’entité visée émis au cours de l’année d’imposition.
Par souci de clarté, les offres des émetteurs dans le cours normal de leurs activités et leurs offres importantes constitueraient un rachat de capitaux propres. De plus, l’émission ou l’annulation d’actions ou de parts dans le cadre de certaines réorganisations et acquisitions de sociétés (p. ex., une réorganisation papillon et certaines liquidations et fusions) ne seront pas considérées comme des émissions ou des rachats de capitaux propres à ces fins.
Le budget de 2023 propose également certaines mesures anti-évitement en ce qui concerne la taxe sur les rachats. Ces mesures prévoient notamment que certaines acquisitions d’actions d’une entité visée par une « société affiliée spécifiée » de l’entité visée (c’est-à-dire une société, une fiducie ou une société de personnes qui est contrôlée, directement ou indirectement, par l’entité visée ou une société, une fiducie ou une société de personnes dont 50 % de la juste valeur marchande des actions est détenue directement ou indirectement par l’entité visée) soient considérées comme un rachat de l’entité par l’entité visée elle-même.
Le budget de 2023 comprend une règle de minimis qui exempte de la taxe sur les rachats les entités qui rachètent moins d’un million de dollars d’actions au cours de l’année d’imposition (au prorata pour les années d’imposition courtes).
3. Règle générale anti-évitement
Le budget de 2023 contient des propositions législatives qui répondent aux préoccupations soulevées par le ministère des Finances dans son document de consultation du 9 août 2022 sur la règle générale anti-évitement (la « RGAE »).
Le budget de 2023 propose les cinq amendements suivants à cette règle :
Préambule
Un préambule sera ajouté à la RGAE pour traiter des questions d’interprétation. À l’heure actuelle, la formulation particulière du préambule proposé n’a pas encore été publiée. Toutefois, le budget de 2023 indique qu’il apportera des éclaircissements sur les trois sujets de préoccupation suivants; i) la RGAE vise à refuser les avantages fiscaux obtenus au moyen d’opérations d’évitement; ii) la RGAE doit trouver un équilibre délicat entre la certitude du contribuable et le mandat du gouvernement de protéger l’assiette fiscale et l’équité du système fiscal; iii) la RGAE est censée s’appliquer, indépendamment du fait que la stratégie de planification fiscale utilisée pour obtenir l’avantage fiscal ait été prévue ou non par le contribuable.
Abaissement de la norme d’une opération d’évitement
Le budget de 2023 vise à réduire le seuil requis pour l’application du test de l’opération d’évitement lorsque « l’un des principaux objectifs » (par opposition à l’« objectif principal ») de cette opération était d’obtenir un avantage fiscal. Dans le cadre du régime actuel, une opération d’évitement exige que l’« objectif principal » d’une opération ou d’une série d’opérations soit l’obtention d’un avantage fiscal.
Règle sur la substance économique
Une règle sur la substance économique serait ajoutée à la RGAE afin de mieux répondre à l’objectif initial de la RGAE d’exiger une substance économique à une opération. La substance économique à une opération doit être considérée à la troisième étape de l’analyse, qui consiste à déterminer s’il y a eu utilisation abusive, entre autres, de la Loi de l’impôt, des règlements, d’une convention fiscale, de tout abus de ceux-ci, lus dans leur ensemble. Le budget de 2023 indique qu’« un manque de substance économique a tendance à révéler une opération d’évitement fiscal. » Toutefois, la RGAE ne s’appliquera pas si les résultats fiscaux d’une opération sont conformes à l’objectif de la disposition invoquée par le contribuable et même s’il y a un manque de substance économique. Les modifications prévoiraient des indicateurs permettant de déterminer si une opération ou une série d’opérations manquent de substance économique.
Il est intéressant de noter que cette proposition ne supplantera pas l’approche générale ni l’accent que le droit fiscal au Canada porte à la forme juridique d’une opération. Au contraire, l’analyse révisée de la RGAE examine s’il y a absence de substance économique, mais pas ce que représente réellement la substance économique.
Pénalité
Le budget de 2023 indique également l’intention du gouvernement d’imposer une pénalité sur les opérations soumises à la RGAE. Ces opérations seront soumises à une pénalité de 25 % du montant de l’avantage fiscal conféré au contribuable. Lorsque l’avantage fiscal comporte un attribut fiscal qui n’a pas encore servi à réduire l’impôt, le montant de l’avantage fiscal serait considéré comme nul.
Les contribuables qui cherchent à éviter l’application de la RGAE peuvent communiquer l’opération à l’ARC, soit dans le cadre des règles de divulgation obligatoire proposées, soit sur une base volontaire.
Prolongation de la période de réévaluation
La période normale de réévaluation sera prolongée de trois ans pour les évaluations RGAE, à moins que le contribuable ne déclare l’opération concernée.
Les propositions législatives (si elles sont adoptées) constitueront certains des changements les plus importants jusqu’à présent dans le contexte de la RGAE. L’attention renouvelée portée à l’absence de substance économique pourrait conduire à une nouvelle jurisprudence dans ce contexte et peut-être à un examen plus approfondi de la part de la Cour suprême du Canada. Par ailleurs, la perspective d’une pénalité importante pourrait s’avérer un élément dissuasif supplémentaire lors de la planification fiscale. Le Canada demeure un territoire dans lequel les obstacles à la planification fiscale sont nombreux et où l’Agence du revenu du Canada est un organe administratif de plus en plus vigilant. Ces ajouts aux RGAE (s’ils sont adoptés) devraient renforcer les obstacles et l’arsenal punitif à la disposition des administrateurs des services fiscaux.
Les propositions susmentionnées font l’objet d’une nouvelle période de consultation, soit jusqu’au 31 mai 2023.
III. Mesures fiscales internationales
Plan d’action BEPS
Le budget de 2023 fournit des renseignements détaillés sur les progrès et les plans du Canada en ce qui concerne le « Cadre inclusif sur l’érosion de la base d’imposition et le transfert des bénéfices » (« BEPS ») dirigé par l’OCDE. Le plan d’action BEPS est régi par un plan de réforme fiscale internationale reposant sur deux piliers, qui réaffectent les bénéfices d’une entreprise multinationale (« EMN ») entre les pays où se trouvent les utilisateurs et les clients de l’EMN (le « premier pilier ») et veillent à ce que l’application d’un taux d’imposition effectif minimum de 15 % sur les bénéfices des grandes EMN (« deuxième pilier »).
Le budget de 2023 a annoncé qu’en l’absence de l’entrée en vigueur de la convention multilatérale de mise en œuvre du premier pilier d’ici le 1er janvier 2024, le Canada imposera une taxe sur les services numériques (« TSN »), applicable à compter de cette date et à l’égard des revenus gagnés à partir du 1er janvier 2022. Des propositions législatives pour la TSN ont été publiées en 2021 et seront révisées dans le cadre d’un processus de consultation publique.
Le deuxième pilier applique un régime global d’impôt minimum aux entreprises multinationales dont les revenus annuels s’élèvent à au moins 750 millions d’euros. Le budget de 2023 a annoncé la mise en œuvre des mesures suivantes en ce qui concerne le deuxième pilier;
- Une règle d’inclusion des revenus (RDIR), qui accordera au Canada le droit principal d’imposer un impôt complémentaire à une entité mère ultime située au Canada dont les revenus proviennent d’opérations d’une EMN dans des territoires dans lesquels ils sont imposés à un taux effectif inférieur à 15 % (en vigueur pour les exercices des EMN à compter du 31 décembre 2023).
- Une règle relative aux profits insuffisamment imposés (RPII) qui permet à un territoire d’imposer un impôt supplémentaire aux entités du groupe de l’EMN situées dans ce territoire si le territoire de rattachement de l’EMN n’a pas mis en œuvre le RDIR (en vigueur pour les exercices fiscaux des EMN à compter du 31 décembre 2024).
Des avant-projets de loi pour chacun des éléments ci-dessus sont attendus dans les mois à venir.
IV. Mesures visant les taxes de vente
Services de compensation relatifs aux cartes de paiement sous le régime de la TPS/TVH
Le budget de 2023 propose de modifier la définition de « service financier » dans la partie IX de la Loi sur la taxe d’accise (Canada) afin d’inclure les services de compensation relatifs aux cartes de paiement dans la liste des services qui sont exclus de la définition, et donc assujettis à la TPS/TVH. Cette proposition de modification fait suite à une récente affaire judiciaire.
Plus précisément, le budget de 2023 propose d’élargir la liste des exclusions prévues dans la définition de « service financier » pour ajouter un service qui est fourni par un « exploitant de réseau de cartes de paiement » à l’égard d’un « réseau de cartes de paiement » et qui est i) un service relatif à l’autorisation d’une opération concernant de l’argent, un compte, une pièce justificative de carte de crédit, une pièce justificative de carte de paiement ou un instrument financier, ii) un service de compensation ou de règlement concernant de l’argent, un compte, une pièce justificative de carte de crédit, une pièce justificative de carte de paiement ou un effet financier; iii) un service rendu conjointement avec un service visé mentionné ci-dessus.
Le terme « exploitant de réseau de cartes de paiement » est défini dans la Loi sur les réseaux de cartes de paiement (Canada) comme une entité qui exploite ou gère un réseau de cartes de paiement. Un réseau de cartes de paiement est à son tour défini comme une carte de crédit ou de débit – ou tout autre dispositif prescrit – utilisée pour accéder à un compte de crédit ou de débit selon les conditions précisées par l’émetteur. Ces exploitants fournissent généralement des services de compensation de cartes (p. ex., le traitement des paiements) aux participants à ce système, notamment les banques.
D’une manière générale, cette modification devrait entrer en vigueur le jour du budget.
N’hésitez pas à communiquer avec un membre de notre équipe pour savoir quelle incidence le budget de 2023 pourrait avoir sur votre situation. Ron Choudhury, Bryant Frydberg, Neil Gurmukh, Brendon Ho, Carolyn Inglis, Anish Kamboj, Emmanuelle Laliberté, Colleen Ma, Justin Ng, Regan O’Neil, Pierce Quaghebeur, Victoria Rodrigues, Stephen Sweeney et notre stagiaire Andrew Rodrigues ont collaboré à l’analyse du budget fédéral cette année.
Nous vous invitons à prendre connaissance de l’infolettre du groupe d’impact social pour connaître les points saillants de l’édition 2023 du budget fédéral, qui auront des répercussions sur le secteur des organismes de bienfaisance et des OBNL.