Le 27 mars 2024, le projet de loi 42, Loi visant à prévenir et à combattre le harcèlement psychologique et la violence à caractère sexuel au travail (le « Projet de loi 42 »), a reçu la sanction royale. Il vise à prévenir et à combattre le harcèlement psychologique et la violence à caractère sexuel au travail, tout en prévoyant de nouveaux recours pour les travailleurs.
Plusieurs des dispositions du Projet de loi 42 sont entrées en vigueur le 27 mars 2024, tandis que d’autres entreront en vigueur le 28 septembre 2024.
Le Projet de loi 42 modifie la législation suivante :
1. La loi sur les accidents du travail et les maladies professionnelles
a. Nouvelles présomptions pour faciliter la reconnaissance des lésions professionnelles découlant de la violence à caractère sexuel
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- Les lésions découlant de la violence à caractère sexuel commise par l’employeur, l’un de ses dirigeants ou l’un des travailleurs dont les services sont utilisés par l’employeur sont présumées survenir par le fait ou à l’occasion du travail.
- Les maladies professionnelles survenant dans les trois mois après qu’un travailleur ait subi de la violence à caractère sexuel au travail seront également présumées être des lésions professionnelles.
Ces présomptions, qui entreront en vigueur le 28 septembre 2024, transfèrent le fardeau aux employeurs, lesquels devront les réfuter. Les employeurs devront donc gérer tout incident avec diligence, proactivité et efficacité, en plus d’assurer une documentation rigoureuse afin que toute problématique soit rapidement identifiée, corrigée et contrôlée.
b. Prolongation du délai de réclamation
Le délai pour déposer une réclamation à la Commission des normes, de l’équité, de la santé et de la sécurité du travail (la « CNESST ») pour une lésion professionnelle résultant d’une violence à caractère sexuel passe de six (6) mois à deux (2) ans.
Cette disposition entrera en vigueur le 28 septembre 2024. Elle souligne l’importance pour les employeurs de conserver un dossier bien documenté sur tous les incidents pertinents afin de permettre une saine gestion des réclamations.
c. Imputation des coûts liés aux lésions professionnelles résultant de violence à caractère sexuel
Le Projet de loi 42 modifie les règles existantes concernant l’imputation des lésions professionnelles. Lorsque la lésion résulte d’une violence à caractère sexuel, les prestations seront imputées à tous les employeurs de toutes les unités, plutôt qu’à un employeur en particulier, ce qui crée une exception à la règle générale d’imputation. Cette modification est entrée en vigueur le 27 mars 2024.
d. Accès aux dossiers médicaux des travailleurs
Le Projet de loi 42 modifie les droits des employeurs en matière d’accès aux dossiers médicaux d’un travailleur détenus par la CNESST lors de la contestation d’une réclamation pour une lésion professionnelle. Désormais, les employeurs ne recevront que des résumés des informations médicales pertinentes nécessaires à la contestation, limitant ainsi considérablement leur accès aux dossiers médicaux complets du travailleur. De plus, des amendes pourront être imposées aux employeurs qui tentent d’obtenir illégalement ou réussissent à obtenir ces dossiers.
Cette disposition entrera en vigueur le 28 septembre 2024, et il est conseillé aux employeurs de collaborer avec des professionnels de la santé pour s’assurer qu’elle est respectée.
2. La loi sur les normes du travail (la « LNT »)
La plupart des dispositions du Projet de loi 42 relatives à la LNT sont entrées en vigueur le 27 mars 2024.
- Obligations des employeurs : Les employeurs ont désormais une responsabilité de prévenir le harcèlement psychologique exercé par « toute personne » à l’égard de leurs employés, y compris les fournisseurs, les clients ou autres tiers.
- Protection contre les représailles : La LNT interdit désormais aux employeurs d’exercer des représailles ou d’imposer des sanctions à l’encontre des employés ayant signalé une situation de harcèlement ou ayant collaboré à la procédure de traitement de plainte.
- Clauses d’amnistie : Le Projet de loi 42 interdit l’application de clauses d’amnistie en ce qui concerne les mesures disciplinaires pour une inconduite impliquant de la violence physique, psychologique ou à caractère sexuel. Les employeurs peuvent désormais prendre en compte les mesures disciplinaires antérieures liées à de telles violences lorsqu’ils imposent de nouvelles mesures disciplinaires pour des fautes similaires, même en présence d’une clause d’amnistie dans une convention collective, un décret ou un contrat de travail.
- Dommages et intérêts punitifs : Auparavant, dans le cadre du régime québécois d’indemnisation des lésions professionnelles sans égard à la faute, les dommages et intérêts punitifs n’étaient pas accordés pour les lésions professionnelles résultant de harcèlement. Le Projet de loi 42 permet désormais au Tribunal administratif du travail d’ordonner aux employeurs de verser des dommages-intérêts punitifs en cas de harcèlement psychologique, même lorsque le préjudice est qualifié de lésion professionnelle.
- Politique de prévention et de traitement du harcèlement psychologique: Les employeurs doivent modifier leur politique de prévention et de traitement du harcèlement psychologique (la « Politique ») d’ici le 28 septembre 2024, afin d’y inclure ce qui suit :
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- les méthodes et les techniques utilisées pour identifier, contrôler et éliminer les risques de harcèlement psychologique, incluant un volet concernant les conduites qui se manifestent par des paroles, des actes ou des gestes à caractère sexuel ;
- les programmes d’information et de formation spécifiques en matière de prévention du harcèlement psychologique qui sont offerts aux personnes salariées ;
- les recommandations concernant les conduites à adopter lors de la participation aux activités sociales liées au travail ;
- les modalités applicables pour faire une plainte ou un signalement à l’employeur ou pour lui fournir un renseignement ou un document ainsi que l’information sur le suivi qui doit être donné par l’employeur ;
- les mesures visant à protéger les personnes concernées par une situation de harcèlement psychologique et celles qui ont collaboré au traitement d’une plainte ou d’un signalement portant sur une telle situation ;
- le processus de prise en charge d’une situation de harcèlement psychologique, incluant le processus applicable lors de la tenue d’une enquête par l’employeur ;
- les mesures visant à assurer la confidentialité d’une plainte, d’un signalement, d’un renseignement ou d’un document reçu ainsi que le délai de conservation des documents faits ou obtenus dans le cadre de la prise en charge d’une situation de harcèlement psychologique, lequel doit être d’au moins deux ans.
Le Projet de loi 42 prévoit également que cette Politique doit être intégrée au programme de prévention ou au plan d’action de l’employeur tel que requis par la Loi sur la santé et la sécurité du travail. Cette disposition entrera en vigueur à une date déterminée par le gouvernement, mais au plus tard le 6 octobre 2025.
3. La loi sur la santé et la sécurité au travail (la « LSST »)
Depuis le 27 mars 2024, la LSST inclut une définition de la « violence à caractère sexuel » :
« « violence à caractère sexuel » : toute forme de violence visant la sexualité ou toute autre inconduite se manifestant notamment par des gestes, des pratiques, des paroles, des comportements ou des attitudes à connotation sexuelle non désirés, qu’elles se produisent à une seule occasion ou de manière répétée, ce qui inclut la violence relative à la diversité sexuelle et de genre. »
Cette définition, qui est susceptible de donner lieu à de nombreuses interprétations, inclut toute forme de violence visant la sexualité ou l’inconduite à connotation sexuelle, qu’elle se produise une seule fois ou de manière répétée, et inclut les actes liés à la diversité sexuelle et de genre.
Si le Projet de loi 42 concerne votre organisation et que vous souhaitez vous conformer aux nouvelles exigences en matière de prévention du harcèlement et de la violence à caractère sexuel sur le lieu de travail, n’hésitez pas à contacter un membre de l’équipe de Miller Thomson spécialisée en droit du travail et de l’emploi.