L’Agence du revenu du Canada (l’« ARC ») tient à rappeler à certaines organisations à but non lucratif (« OBNL ») que l’allocation des fonds qu’elles reçoivent sous forme de dividendes imposables pourrait compromettre leur exemption fiscale.
En effet, dans sa directive 2018-0776681E5 (du 30 mars 2023) (la « directive de l’ARC »), l’ARC a clarifié les conséquences fiscales lorsque les OBNL (par exemple, les syndicats de copropriétaires) distribuent à leurs membres le capital ou les dividendes imposables qu’ils reçoivent.
Dans cet exemple, la filiale en propriété exclusive (la « filiale ») du syndicat de copropriétaires (le « syndicat ») avait l’intention de vendre les biens immobiliers dont la filiale était propriétaire, puis de distribuer le gain en capital au syndicat sous forme de dividendes en capital et de dividendes imposables. Le syndicat a demandé à l’ARC si l’OBNL pouvait accorder des dividendes à ses membres tout en conservant son statut.
Ce que les OBNL doivent savoir sur l’obtention d’une exemption fiscale
À titre de rappel, nous précisions que l’alinéa 149(1) l) de la Loi de l’impôt sur le revenu (Canada) (la « LIR ») prévoit une exemption fiscale aux « organisations à but non lucratif », à condition que celles-ci remplissent les quatre conditions suivantes :
- être un cercle ou une association;
- ne pas être un organisme de bienfaisance;
- être constitué et administré uniquement pour s’assurer du bien-être social, des améliorations locales, s’occuper des loisirs ou fournir des divertissements, ou exercer toute autre activité non lucrative;
- aucun revenu n’était payable à un propriétaire, un membre ou un actionnaire, ou ne pouvait par ailleurs servir au profit personnel de ceux-ci, sauf si le propriétaire, le membre ou l’actionnaire était un cercle ou une association dont le but premier et la fonction étaient de promouvoir le sport amateur au Canada.
Les organisations ne s’inscrivent pas comme OBNL dans le but d’obtenir une exemption fiscale en vertu de l’alinéa 149(1) l). Le test d’OBNL est plutôt un test factuel qui permet d’examiner chaque année l’organisation et ses activités dans leur ensemble afin de vérifier si elles répondent aux exigences de l’alinéa 149(1) l). Une organisation qui se qualifie à titre d’OBNL une année pourrait ne pas se qualifier à ce titre l’année suivante.
Le but lucratif constitue un critère factuel
Les syndicats de copropriétaires résidentiels sont structurés conformément aux lois provinciales (par exemple, la Strata Property Act de la Colombie-Britannique). Ils ne fonctionnent pas comme des entités purement commerciales, mais sont plutôt des exemples d’organisations à vocations autres que la recherche de profits. Par conséquent, les syndicats de copropriétaires correspondent généralement à la troisième condition de l’alinéa 149(1) l).
Toutefois, dans la directive de l’ARC, les autorités fiscales du Canada ont lancé l’avertissement que si une organisation détient des actions à des fins de revenu provenant de biens, l’organisation pourrait être considérée comme ayant un but lucratif même si ce revenu est utilisé pour poursuivre son objectif à but non lucratif. La question de savoir si une organisation qui détient des actions dans une filiale en propriété exclusive et qui reçoit des dividendes de celle-ci sera considérée comme ayant un but lucratif constitue une question de fait.
Dividendes imposables ou dividendes en capital
Pour qu’une organisation soit qualifiée d’OBNL, la quatrième condition de l’alinéa 149(1) l) exige que le revenu de l’organisation ne puisse être utilisé au profit des propriétaires, des membres ou des actionnaires[1].
L’ARC confirme que le revenu ne comprend pas les gains en capital imposables[2] ni les dividendes en capital[3]. Par conséquent, la distribution de dividendes en capital aux actionnaires ou aux membres ne contrevient pas aux dispositions de la quatrième condition de l’alinéa 149(1) l) de la LIR et n’aura pas d’incidence sur l’exemption fiscale d’une OBNL.
En revanche, contrairement aux dividendes en capital, les dividendes imposables sont considérés comme des revenus[4]. L’ARC a fait savoir aux organisations (notamment le syndicat) qui accordent des dividendes imposables à leurs membres qu’elles contreviennent à la quatrième condition et qu’elles perdront leur exemption fiscale en vertu de l’alinéa 149(1) l).
Perte du statut d’OBNL
Si une organisation ne respecte plus les conditions énoncées à l’alinéa 149(1) l), elle devient une entité imposable et est assujettie à d’autres règles. Conformément aux dispositions du paragraphe 149(10), l’exercice financier courant de l’organisation est réputé avoir pris fin immédiatement avant que l’organisation ne perde son exonération et un nouvel exercice financier commence. À ce moment-là, l’organisation est également réputée avoir disposé de tous ses actifs avant de les acquérir de nouveau à leur juste valeur marchande.
Les organisations qui perdent leur statut d’OBNL au cours d’une année peuvent se qualifier à nouveau à ce titre au cours d’une année ultérieure. La question de savoir si l’exonération fiscale sera accordée au cours d’une année ultérieure constitue un critère factuel déterminé après évaluation de toutes les activités de l’organisation au cours l’année en question à la lumière des conditions énoncées à l’alinéa 149(1) l).
Points à retenir
Même si la directive de l’ARC met en lumière la situation des syndicats de copropriétaires, elle présente des réflexions utiles à toutes les organisations qui cherchent à obtenir une exonération fiscale à titre d’OBNL en vertu de l’alinéa 149(1) l), entre autres les associations de promotion de sports amateurs, les organisations à vocation sociale ou récréative, certains organisateurs de festivals et les associations professionnelles[5].
L’ARC tient à rappeler aux OBNL qu’elles peuvent perdre leur exonération fiscale s’il ressort de leur évaluation qu’elles ont un but lucratif. Le statut des OBNL qui détiennent des actions en vue de tirer un revenu d’un bien pourrait être compromis.
De plus, toute OBNL qui accorde à ses membres les dividendes imposables qu’elle reçoit perdra son statut d’OBNL, car la quatrième condition prévue à l’alinéa 149(1) l) ne sera plus respectée. Toutefois, les OBNL qui accordent des dividendes en capital à leurs membres ne seront pas touchées par cette disposition, car le versement de dividendes en capital n’est pas considéré comme une distribution de « revenus ».
La directive de l’ARC insiste sur l’importance pour les organisations de conserver des registres à jour permettant de vérifier que la source de toute distribution aux membres était un dividende en capital que l’organisation a reçu.
Si vous avez des questions au sujet de la directive de l’ARC ou si vous craignez que les activités de votre organisation puissent compromettre son statut d’OBNL, communiquez avec un membre de l’équipe Impact social de Miller Thomson.
[1] Sauf si son but premier et sa fonction est de promouvoir le sport amateur au Canada.
[2] ITA, art. 149(2).
[3] ITA, art. 82(2) b).
[4] ITA, art. 82(1).
[5] Il est important de faire la distinction entre une OBNL et un organisme de bienfaisance enregistré. Les deux types d’organisations sont assujetties à des dispositions différentes de la LIR pour bénéficier d’une exonération fiscale.