Formes de dons de bienfaisance par voie testamentaire

Les dons de bienfaisance effectués par l’entremise de testaments peuvent se présenter sous plusieurs formes : legs direct, don de la totalité ou d’une partie du reliquat de la succession, legs conditionnel au décès d’un bénéficiaire avant celui du testateur, don effectué à l’échéance d’un intérêt viager, don d’un intérêt bénéficiaire discrétionnaire dans une fiducie testamentaire et autres dons survenant au décès des donateurs.

Par ailleurs, un donateur peut désigner un organisme de bienfaisance enregistré à titre de bénéficiaire du produit d’une police d’assurance vie ou d’un régime enregistré (REER, FERR ou CELI).

Les successions assujetties à l’imposition à taux progressifs

Le 16 décembre 2014, des modifications à la Loi de l’impôt sur le revenu (Canada) (la « LIR ») sont entrées en vigueur et ont modifié considérablement la façon dont les dons de bienfaisance par voie testamentaire sont traités sous son régime.

Une nouveauté notable : la succession assujettie à l’imposition à taux progressifs (désignée familièrement la SAIP). Une succession assujettie à l’imposition à taux progressifs est une succession qui prend forme au décès d’un particulier et par suite de ce décès pourvu :

  • que la succession soit à ce moment-là une fiducie testamentaire au sens attribué à ce terme dans la LIR;
  • que la succession se désigne elle-même comme SAIP dans sa déclaration de revenus pour la première année d’imposition se terminant après 2015;
  • qu’aucune autre succession ne se désigne elle-même comme SAIP du défunt;
  • que le numéro d’assurance sociale du défunt soit fourni.

De plus, la nouvelle réglementation prévoit qu’une SAIP ne peut maintenir cette forme que pendant trente-six (36) mois après la date du décès du particulier. À la fin de ces 36 mois, la succession procède à la clôture de l’année d’imposition, et le statut de SAIP est perdu. Par conséquent, il est important de rappeler que toute planification reposant sur le statut de SAIP doit être effectuée au cours de cette période.

Quels sont les avantages du statut de SAIP?

Le statut de SAIP confère de nombreux avantages dont les autres fiducies testamentaires ne peuvent bénéficier. Le présent article porte sur les avantages liés aux dons de bienfaisance.

Concernant les dons de bienfaisance, le régime actuel prévoit des règles souples pour les dons par testament ou par succession, la possibilité de ne réaliser aucun gain en capital pour la succession concernant les dons de titres cotés en bourse, de biens écosensibles et de biens culturels d’une SAIP et la possibilité de faire des dons d’actions d’entreprises privées au décès.

La loi a apporté des modifications importantes aux dons de bienfaisance par voie testamentaire, à la fois à l’égard du moment d’effectuer ces dons de bienfaisance aux fins de l’impôt et de la constatation de ceux-ci.

Les dons par testament et les dons dirigés (REER, FERR, CELI et produits d’assurance vie) sont réputés avoir été effectués par la succession au moment où le bien est transféré à l’organisme de bienfaisance.

Par ailleurs, la juste valeur marchande du don à des fins de reçu fiscal est déterminée au moment du transfert des biens plutôt qu’à la date du décès.

La loi assouplit la possibilité d’utiliser les crédits d’impôt pour les activités de bienfaisance à l’égard des dons par testament et des dons dirigés s’ils sont effectués par une SAIP.

Si un don de bienfaisance est effectué par une SAIP ou dans les deux (2) ans qui suivent la date à laquelle la SAIP cesse d’avoir le statut de SAIP (à condition qu’elle soit admissible au titre de SAIP, sauf en ce qui concerne l’expiration de la période de trente-six [36] mois), la succession peut répartir les crédits d’impôt pour activités de bienfaisance entre les catégories suivantes :

  • la dernière année d’imposition du donateur;
  • l’année d’imposition précédant l’année d’imposition du décès;
  • l’année d’imposition de la succession au cours de laquelle le don est fait et toutes les années antérieures de la SAIP.

De plus, le taux d’inclusion des gains en capital de zéro au décès pour les dons de titres cotés en bourse, les dons de biens écosensibles et les dons de biens culturels sera également accessible s’ils sont effectués par une SAIP ou dans les 24 mois qui suivent la date à laquelle la SAIP cesse d’être une SAIP.

La limite annuelle de 100 % du revenu net pour les dons de bienfaisance durant la dernière année d’imposition du donateur ou l’année d’imposition précédant l’année d’imposition du décès continue de s’appliquer.

L’autre exigence est que les biens transférés à l’organisme de bienfaisance par la SAIP ou la SAIP prolongée doivent effectivement appartenir au défunt à la date du décès ou être des biens de remplacement pour ceux-ci. Il est important de garder cette règle à l’esprit lors de restructurations après le décès lorsque d’autres dons de bienfaisance sont également prévus, car les biens à transférer après ladite restructuration pourraient ne pas appartenir effectivement au défunt à la date du décès ou ne pas être des biens de remplacement. Par exemple, les dividendes déclarés sur les actions détenues par le défunt dans l’intention de les utiliser pour financer un don de bienfaisance ne sont pas admissibles. Il est également important de noter qu’un emprunt par une succession pour effectuer un don de bienfaisance dans les soixante (60) mois n’est pas non plus admissible.

Toute succession autre qu’une SAIP ou une SAIP prolongée peut continuer à réclamer des crédits d’impôt pour dons de bienfaisance à l’égard des autres dons de l’année au cours de laquelle les dons sont effectués ou l’une des cinq (5) années suivantes.

Délais et pressions

Si cette flexibilité et ces précisions sont les bienvenues, elles imposent néanmoins une pression supplémentaire aux exécuteurs testamentaires ou liquidateurs. Ces derniers doivent veiller à ce que les biens de la succession soient transférés aux organismes de bienfaisance dans les soixante (60) mois qui suivent le décès pour pouvoir répartir les crédits d’impôt pour don de bienfaisance dans l’année du décès ou l’année précédente. Contrairement à d’autres délais prévus par la LIR, il n’existe pas de disposition permettant au ministre de prolonger ce délai. Ce délai de soixante (60) mois peut être difficile à respecter si la succession est engagée dans un litige (réclamations en vertu de la Loi sur le droit de la famille, réclamations au titre du soutien de personnes à charge, contestations de testament, etc.) ou si les biens de la succession sont non liquides (immobilier, actions d’entreprise privée). De plus, même en temps normal, si la valeur du patrimoine augmente ou diminue après le décès du donateur, les exécuteurs testamentaires ou liquidateurs pourraient se faire reprocher, selon les conséquences fiscales qui en découlent, d’avoir agi trop vite ou d’avoir trop tardé à transférer le don à l’organisme de bienfaisance dans le délai de soixante (60) mois.

À ces problèmes s’ajoutent des pressions supplémentaires, car les exécuteurs testamentaires ou liquidateurs peuvent engager leur responsabilité personnelle s’ils distribuent des actifs à des organismes de bienfaisance sans avoir obtenu au préalable des certificats de décharge de la part de l’ARC, ce qui peut, dans certains cas, être long.

Vous avez des questions au sujet des successions assujetties à l’imposition à taux progressifs et des dons de bienfaisance par voie testamentaire? Un membre du groupe Impact social ou de l’équipe des Services aux particuliers de Miller Thomson se fera un plaisir de vous aider.