La Loi canadienne sur l’esclavage moderne : Ce que les entreprises doivent savoir dès maintenant !

29 août 2023 | Bruno Caron, P. Jason Kroft

VUE D’ENSEMBLE

La Loi sur la lutte contre le travail forcé et le travail des enfants dans les chaînes d’approvisionnement (Loi canadienne sur l’esclavage moderne) entrera en vigueur le 1er janvier 2024. L’objectif de cette loi consiste à réduire le recours à la main-d’œuvre forcée et au travail des enfants en améliorant la transparence le long des chaînes d’approvisionnement. Elle vise à intégrer dans la législation canadienne plusieurs conventions internationales qui définissent et interdisent toute forme de travail forcé et de travail des enfants.

TRAVAIL FORCÉ ET TRAVAIL DES ENFANTS

Le travail est qualifié de forcé lorsque la personne concernée peut légitimement craindre pour sa sécurité ou appréhender des sanctions si elle refuse de s’y soumettre.

Le travail des enfants, quant à lui, englobe toute activité exercée par des personnes de moins de 18 ans qui est en violation avec la législation canadienne, qui est fournie dans des conditions préjudiciables sur le plan mental, physique, social ou moral ou de manière qui compromet leur scolarisation.

ENTITÉS ASSUJETTIES AUX OBLIGATIONS DE DÉCLARATION

On entend par entité déclarante non gouvernementale toute personne morale, fiducie, société de personnes ou autre organisation non constituée en personne morale qui répond à l’une des deux conditions suivantes :

  1. Être cotée à une bourse de valeurs au Canada;
  2. Posséder un établissement au Canada, exercer des activités commerciales au Canada ou posséder des actifs au Canada, et, en tenant compte de ses états financiers consolidés, remplir au moins deux (2) des conditions ci-après pour au moins un de ses deux derniers exercices financiers :
    1. posséder des actifs d’une valeurs d’au moins 20 M$CA;
    2. avoir généré des revenues d’au moins 40 M$CA;
    3. employer en moyenne au moins 250 employés.

De plus, pour être assujettie aux obligations de déclaration annuelle, l’entité déclarante non gouvernementale doit être engagée dans l’une des activités suivantes :

  1. produire, vendre ou distribuer des marchandises au Canada ou ailleurs;
  2. importer au Canada des marchandises produites à l’extérieur du Canada;
  3. contrôler une entité qui se livre à une activité décrite aux points 4 ou 5.

Il est à noter que le terme « marchandises » n’est pas défini dans la Loi canadienne sur l’esclavage moderne. Dans une interprétation plus large de ce terme, les marchandises pourraient inclure des actifs immatériels, comme les logiciels.

D’AUTRES ÉTATS À LA RESCOUSSE

Le Royaume-Uni et l’Australie ont tracé la voie avec une législation similaire qui a fortement influencé l’adoption de la Loi canadienne sur l’esclavage moderne. Il convient donc d’étudier ce qui est fait dans ces États pour vérifier si les sociétés affiliées à une entité sont déjà tenues de se conformer à une législation comparable et si elles doivent respecter des obligations de déclaration.

À QUEL MOMENT FAIRE UNE DÉCLARATION

Annuellement l’entité assujettie doit faire rapport au plus tard le 31 mai de chaque année au ministre de la Sécurité publique et de la Protection civile. Le premier rapport annuel en vertu de la Loi canadienne sur l’esclavage moderne doit être soumis au plus tard le 31 mai 2024.

COMMENT SE CONFORMER À L’OBLIGATION DE DÉCLARATION PRÉVUE DANS LA LOI CANADIENNE SUR L’ESCLAVAGE MODERNE?

Le rapport annuel doit comporter les éléments suivants :

  • La description des mesures concrètes mises en œuvre par l’entité au cours de l’exercice précédent afin de prévenir et d’atténuer les risques relatif au recours au travail forcé ou au travail des enfants à l’une ou l’autre étape de la production de marchandises, que ce soit au Canada ou ailleurs, ou de leur importation au Canada.
  • Des informations concernant la structure de l’entité, ses politiques relatives au travail forcé et au travail des enfants, les parties de ses chaînes commerciales et de ses chaînes d’approvisionnement exposées à ces enjeux, les mesures correctives mises en œuvre, la formation dispensée aux employés, ainsi que la méthode d’évaluation retenue pour garantir l’absence de travail forcé et de travail des enfants.

Il est également possible de préparer un rapport annuel conjoint pour l’ensemble des entités qui composent l’entreprise.

À QUEL ENDROIT FAIRE UNE DÉCLARATION?

Le rapport annuel doit être déposé auprès du ministre de la Sécurité publique et de la Protection civile et publié de manière visible sur le site web de l’entité. De plus, si l’entité est constituée en vertu de la Loi canadienne sur les sociétés par actions ou d’une autre loi fédérale, le rapport annuel devra être transmis aux actionnaires en même temps que les états financiers annuels.

QUI DOIT APPROUVER LA DÉCLARATION?

Le rapport annuel doit être approuvé par le comité de direction de l’entité concernée, c’est-à-dire, le conseil d’administration s’il s’agit d’une société.

Si un rapport annuel conjoint est produit, il doit être approuvé par le corps dirigeant de chaque entité concernée ou par le corps dirigeant de l’entité qui contrôle chaque entité visée par le rapport annuel conjoint.

L’approbation du rapport annuel doit être attestée par une déclaration incorporée dans le rapport et par la signature d’au moins l’un des membres du corps dirigeant de chaque entité qui a approuvé le rapport annuel.

ÉTAPES À SUIVRE AVANT DE DÉPOSER LE RAPPORT ANNUEL

Lors de la préparation du rapport annuel, l’entité concernée doit suivre plusieurs étapes, notamment :

  • Recueillir des renseignements détaillés au sujet de sa chaîne d’approvisionnement afin de recenser les potentielles zones de risque. Cette analyse peut englober une évaluation des risques par zone géographique, par secteur d’activité, par industrie, par produit ou service ainsi que par intervenant le long de la chaîne d’approvisionnement.
  • Rédiger des politiques internes et des directives visant à éliminer le travail forcé ou le travail des enfants le long de sa chaîne d’approvisionnement.
  • Mettre en place des procédures de vérification diligente afin de repérer les éventuelles situations de travail forcé ou de travail des enfants, qui devront être documentées dans le rapport annuel. En cas de signalement de telles situations, l’entreprise doit prendre des mesures correctives pour y remédier.
  • Modifier ou adapter les contrats de fourniture ou de prestation de services actuels et futurs afin d’y incorporer les clauses spécifiques autorisant l’entité concernée à demander et à obtenir de la part de ses fournisseurs et prestataires de services les renseignements nécessaires pour mener à bien la vérification diligente requise en vertu de la Loi canadienne sur l’esclavage moderne.
  • Réviser les attestations et les garanties contenues dans ces contrats afin de prévenir et de sanctionner contractuellement toute forme de travail forcé et de travail des enfants.

SANCTIONS EN CAS DE NON-RESPECT DE LA LOI CANADIENNE SUR L’ESCLAVAGE MODERNE

Toute entité (y compris ses administrateurs, dirigeants, agents ou mandataires) qui omet de déposer et de publier son rapport annuel, qui fait obstruction ou refuse de coopérer lors d’une enquête ou la prise de mesures coercitives, ou qui fournit des renseignements faux ou trompeur commet un infraction et encourt, sur déclaration de culpabilité par procédure sommaire, une amende maximale de 250 000 $.

Le Groupe responsabilité sociale d’entreprises et marché du carbone à mis en place une boîte à outils afin d’aider les clients à satisfaire aux nouvels exigences de divulgation requises en vertu de la Loi canadienne sur l’esclavage moderne. N’hésitez pas à nous consulter pour de plus ample information à ce sujet.

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