Les Canadiens et Canadiennes sans lien de parenté comptent pour près du tiers des ménages au Canada[1]. Dans la Partie 1 de cette série de deux articles, nous avons expliqué pourquoi la planification successorale était importante pour les Canadiens qui n’ont pas de parents proches, et ce, même s’ils n’ont pas à subvenir aux besoins de personnes à charge. Nous avons également fait part de quelques considérations générales concernant la gestion des frais de planification et avons fourni des conseils utiles pour le choix d’un exécuteur ou d’un procureur.

Dans cette seconde partie, nous discutons de trois sujets populaires en matière de planification successorale dont vous pouvez être appelé à tenir compte lors de l’élaboration de la planification successorale d’un client canadien qui n’a pas de famille proches: 1) les legs à des mineurs; 2) les dons à des organismes de bienfaisance; 3) les dispositions à prendre pour les animaux de compagnie.

Les legs à des mineurs

Bon nombre de Canadiens sans lien de parenté peuvent souhaiter de  laisser des biens à des membres de la génération suivante, par exemple à des nièces ou à des neveux ou encore aux enfants d’amis proches.

Si la nièce, le neveu ou l’enfant de l’ami de votre client est mineur, il peut être nécessaire, selon la valeur du legs, de prévoir une fiducie dans le testament — ce qu’on appelle une fiducie testamentaire — pour autoriser la fiducie à détenir la somme ou le bien légué au profit de l’enfant jusqu’à ce qu’il atteigne l’âge de la majorité. Sinon, la province prend en charge le legs fait au mineur dont la valeur est supérieure à un certain montant jusqu’à ce qu’il devienne majeur.

Voici quelques considérations importantes à prendre en compte lors de la constitution d’une fiducie testamentaire :

  • Est-ce que le montant en jeu justifie la création d’une fiducie? Il ne faut pas oublier que les frais administratifs, la rétribution du fiduciaire, l’obligation de rendre régulièrement des comptes en justice et les honoraires d’avocat sont des frais courants associés à l’administration d’une fiducie.
  • Qui sera désigné comme fiduciaire(s) pour gérer la fiducie pour le compte du bénéficiaire mineur? Le fiduciaire possède-t-il les « trois qualités » requises? Le fiduciaire est-il susceptible de vivre aussi longtemps que la durée prévue de la fiducie? Le testament prévoit-il d’autres fiduciaires ou des fiduciaires remplaçants? Le testament prévoit-il une rétribution adéquate pour le fiduciaire?
  • Selon quelles modalités et à quel moment le mineur devrait-il recevoir la totalité du capital de la fiducie? Le bénéficiaire serait-il trop jeune pour gérer la totalité des biens qui lui sont légués dès l’âge de sa majorité (18 ou 19 ans, selon la province). La distribution finale devrait-elle avoir lieu en une seule fois à un âge adulte précis ou en versements étalés à des âges successifs une fois la majorité atteinte? Le fiduciaire devrait-il avoir le pouvoir discrétionnaire d’empiéter sur le capital au fur et à mesure que les besoins du bénéficiaire et d’autres facteurs évoluent?
  • Lorsque la détention d’un bien immobilier en fiducie pour un mineur est envisagée — comme une maison ou un appartement en copropriété —, il faut également tenir compte du lieu de résidence du tuteur désigné du mineur, de la possibilité pour le fiduciaire de vendre ou d’échanger le bien si la situation fait en sorte qu’il n’est plus possible de vivre dans la maison d’origine et, enfin, de la nécessité de mettre de côté un fonds supplémentaire pour les dépenses immobilières, les taxes et l’entretien de l’immeuble.

Les dons à des organismes de bienfaisance

Les Canadiens sans lien de parenté et qui participent à des activités philanthropiques ou qui ont d’autres liens avec des organismes de bienfaisance peuvent souhaiter faire un don à un organisme de bienfaisance dans leur testament. De plus, les dons à des organismes de bienfaisance peuvent donner droit à un crédit d’impôt pour don de bienfaisance pouvant contribuer à réduire — voire à éliminer — l’impôt à payer au moment du décès.

Les dons de bienfaisance par voie testamentaire nécessitent une planification minutieuse pour s’assurer de respecter les volontés, qui peuvent être à la fois caritatives et fiscales, de votre client.

Les Canadiens qui souhaitent faire un don à un organisme de charité par testament devraient se poser les questions suivantes :

  • Est-ce que je me suis assuré que l’organisme de bienfaisance de mon choix est effectivement un organisme de bienfaisance enregistré qui peut délivrer aux fins de l’impôt un reçu pour don de bienfaisance?
  • Est-ce que le don doit servir aux fins générales de l’organisme de bienfaisance (p. ex. « doit être utilisé aux fins de l’organisme de bienfaisance déterminées par le conseil d’administration ») ou à certaines fins restreintes (p. ex., créer un fonds de dotation pour une bourse ou pour financer la recherche sur une maladie particulière)? S’agit-il de fins caritatives conformes aux fins poursuivies par l’organisme de bienfaisance? Si les fins sont restreintes, le testament permet-il à l’organisme de bienfaisance de les modifier si leur réalisation s’avère plus tard impossible ou peu réaliste?
  • Mon testament autorise-t-il mes exécuteurs à consentir le don à un autre organisme de bienfaisance dans le cas où l’organisme de bienfaisance original fusionne, change de nom ou d’emplacement ou cesse ses activités?
  • Mon don est-il fait sous forme d’actifs liquides ou quasi liquides (comme des sommes d’argent ou des titres négociables) ou sous forme d’actifs non liquides (comme des terrains ou des actions de sociétés privées)? Est-ce que je fais don d’une somme d’argent précise ou d’un pourcentage de ma succession? L’organisme de bienfaisance de mon choix va-t-il accepter les actifs dont je compte lui faire don? S’il faut un certain temps pour liquider les actifs ou pour rendre compte à l’organisme de bienfaisance, le moment où la donation éventuelle sera effectuée aura-t-il une incidence sur la capacité de ma succession de reporter les crédits d’impôt pour dons aux années d’imposition où ces crédits sont nécessaires (c.-à-d. à la date de mon décès)?

Il est fortement recommandé de rencontrer à l’avance un conseiller juridique spécialisé dans la planification successorale pour s’assurer que les intentions caritatives du client soient respectées et qu’elles bénéficient d’un traitement fiscal avantageux.

Les dispositions à prendre pour les animaux de compagnie

Bon nombre de Canadiens sans lien de parenté peuvent vouloir prendre les dispositions nécessaires pour s’assurer que quelqu’un s’occupe de leurs animaux de compagnie après leur décès ou en cas d’incapacité.

La loi considère les animaux domestiques comme des biens. Si le testament ne prévoit pas de clause particulière en ce qui concerne l’animal de compagnie, le sort de ce dernier sera déterminé selon ce qu’il advient du reliquat de la succession. Si le testament stipule que le reliquat est réparti entre plusieurs bénéficiaires, l’exécuteur testamentaire a généralement le dernier mot quant au bénéficiaire qui recevra l’animal, à condition que le bénéficiaire soit également disposé à accepter l’animal, bien entendu.

Les Canadiens sans lien de parenté qui souhaitent léguer un animal à un bénéficiaire particulier avec des instructions précises devraient tenir compte des éléments suivants :

  • Ai-je décidé à quel ami ou à quel parent j’aimerais confier mon animal après mon décès et ai‑je discuté avec cette personne de l’arrangement proposé? En discutant à l’avance avec le bénéficiaire ou le responsable anticipé de l’animal, on peut éviter des surprises et s’assurer que l’animal ne se retrouve pas sans foyer.
  • Ai-je désigné dans mon testament d’autres bénéficiaires ou responsables pour le cas où la personne qui est mon premier choix ne pourrait ou ne voudrait assumer cette responsabilité?
  • Devrais-je envisager de faire don d’une somme d’argent supplémentaire au bénéficiaire ou au responsable de l’animal pour alléger le fardeau financier associé à cette responsabilité?
  • Ai-je examiné les avantages et les inconvénients de la constitution d’une « fiducie pour animal de compagnie » si les fonds à mettre de côté sont importants? Toutefois, les fiducies à but non caritatif sont assujetties à certaines règles et restrictions, et les dépenses et la complexité inhérentes à la constitution d’une fiducie pour animal de compagnie risquent de l’emporter sur son aspect pratique.

Le fait d’envisager ces questions lorsque vous entamez votre planification successorale et d’y réfléchir avant votre première rencontre avec un conseiller en planification successorale peut vous aider à adapter votre planification à votre situation personnelle de manière rapide et rentable.

Voilà qui conclut notre série de deux articles sur la planification successorale des personnes seules au Canada.

Si vous avez des questions sur cet article ou si vous voulez créer ou mettre à jour un plan successoral, communiquez avec Stephen Hsia (à Vancouver) ou Honor Lay (à Toronto) ou avec un membre du groupe Services aux particuliers de Miller Thomson S.E.N.C.R.L., s.r.l. dans votre province.


[1] Peter Zimonjic, CBC News, “Number of singles, common-law relationships and roommates rises as Canada’s households evolve” (July 13, 2022), online:  https://www.cbc.ca/news/politics/canada-changing-households-military-1.6519440 (en anglais)